La carte de France des prêtres - La Croix - 21 mai 2010

À l'occasion de l'Année sacerdotale, «La Croix» a renouvelé une étude statistique déjà menée en 2004 auprès de tous les diocèses de France métropolitaine

Accès à la carte : http://perepiscopus.over-blog.com/article-nombre-de-pretres-et-de-seminaristes-par-diocese-50836723.html

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La carte de France des prêtres

Le prêtre français est un prêtre âgé. Que le manque de vocations sacerdotales pèse sur la pyramide des âges des prêtres n'est pas une surprise, mais l'ampleur du phénomène est impressionnante.

L'enquête effectuée par La Croix auprès de tous les diocèses du territoire (à l'exception du diocèse aux armées et de la Mission de France) met en lumière la proportion très importante des prêtres de plus de 75 ans, âge de la retraite pour le clergé dans l'Église catholique.

Aujourd'hui, « l'âge médian » des 14 000 prêtres incardinés est même supérieur à cette fameuse barre des 75 ans : les prêtres de plus de 75 ans sont aussi nombreux que ceux âgés de moins de 75 ans ! À Saint-Dié, où 153 prêtres sont incardinés, on compte 109 prêtres de plus de 75 ans. Arras, qui revendique 258 prêtres incardinés, doit aussi assumer 170 prêtres de plus de 75 ans…

De grandes inégalités territoriales

Mais, comme le précise ce diocèse, « tous ne sont pas hors activité ». Crise des vocations oblige, les prêtres retraités sont de plus en plus nombreux à conserver des responsabilités. Si nombreux, même, que les responsables diocésains ont forgé un autre terme pour désigner ceux qui ont réellement cessé toute activité : les « retirés ». À Montauban, « 25 des 49 prêtres de plus de 75 ans sont retirés, les autres ayant conservé des responsabilités ». À Pamiers, 25 des 29 prêtres âgés sont toujours en activité…

Ce qui frappe, donc, c'est moins la diminution du nombre de prêtres - après tout, avec une moyenne d'un prêtre pour 5200 habitants, la France garde une situation enviable par rapport à nombre de pays africains ou asiatiques - que leur âge élevé. Arrive à la retraite une génération de prêtres particulièrement nombreuse, celle ordonnée dans les années 1950. Une donnée avec laquelle les communautés chrétiennes doivent compter : en termes de paroisses, de cohabitation avec les jeunes prêtres, mais encore en termes financiers et humains.

Cette « France des prêtres » révèle aussi de grandes inégalités territoriales. Se dessine, de manière encore plus marquée, la distinction entre une France de l'Ouest et du Nord catholique (à laquelle s'ajoutent les diocèses concordataires), où l'encadrement clérical est relativement élevé, et une France du Sud et du Sud-Ouest où le manque de prêtres devient patent.

Les diocèses apportent des réponses différentes

Lille compte encore un prêtre pour 4000 habitants, Rennes un pour moins de 3000. Les diocèses ruraux, comme Saint-Claude, Rodez, Mende ou Le Puy-en-Velay, affichent naturellement, du fait de leur faible population, des taux flatteurs. Mais cela n'est guère significatif, compte tenu de l'âge de ces prêtres et surtout du nombre de kilomètres à parcourir pour couvrir le territoire.

Plus grave, la carte découvre la situation extrêmement critique des diocèses urbains, à l'exception de Paris. Bordeaux (7900) et Montpellier (6100) n'ont pas la chance de Quimper ou de Nantes. Quant à la banlieue parisienne, elle est « sinistrée » : Évry, Pontoise et, surtout, Saint-Denis qui a un prêtre pour plus de 20 000 habitants, ce qui en fait un véritable « diocèse de mission ».

À cette brutale diminution du nombre de prêtres, les diocèses apportent des réponses différentes. Certains font largement appel à des prêtres religieux ou membres d'instituts. Par exemple, à Fréjus-Toulon, 285 prêtres sont « actifs au service du diocèse » (parmi lesquels 97 religieux) mais seulement 188 sont incardinés. Idem à Avignon, qui affiche 149 prêtres présents pour 87 prêtres incardinés et 24 religieux.

Le prêtre français est suroccupé

Ailleurs, les prêtres étrangers, non rattachés canoniquement au diocèse, représentent un appui capital : à Pontoise (où résident 181 prêtres) 62 prêtres incardinés côtoient 51 prêtres étrangers « principalement polonais et africains » et 68 religieux. À Évry, 161 prêtres sont actifs dans le diocèse, mais seulement 77 sont incardinés. Cette proportion devrait augmenter rapidement : sur 756 séminaristes, fin 2009, 15% sont de nationalité étrangère, en vue d'une incardination en France…

D'autres diocèses ont fait le choix d'ordonner des diacres permanents, à tel point que, ici ou là, ces derniers dépassent même en nombre les prêtres de moins de 65 ans. Comme à Châlons-en-Champagne, 19 diacres pour 8 prêtres de moins de 65 ans… ou à Évreux qui compte 25 diacres, et seulement 22 prêtres de moins de 65 ans.

Âgé, le prêtre français n'en est pas moins suroccupé. Corollaire logique de la baisse du nombre de prêtres en activité, le nombre moyen de clochers par curé est en effet en nette hausse, en particulier dans le monde rural. À Langres, chacun des 50 prêtres incardinés du diocèse doit s'occuper de 50 à 60 clochers, sans compter, précise le diocèse, « trois à quatre charges » d'aumônerie notamment…

Plus de séminaristes que de prêtres quittant le ministère

La situation est tout autant inégale pour les futurs prêtres que pour les prêtres. Si, globalement, le nombre d'ordinations est en recul - 89 en 2009 -, le nombre de séminaristes est extrêmement variable selon les diocèses.

L'existence d'une ville universitaire attractive est un atout : Châlons-en-Champagne n'a ordonné aucun prêtre depuis dix ans, à l'inverse le diocèse d'Orléans revendique 10 séminaristes. Les lieux de maturation cités par les diocèses dans notre enquête sont révélateurs : le scoutisme, la famille et laparoisse, notamment les servants d'autel restent les plus fréquents. Viennent ensuite les Journées mondiales de la jeunesse, les aumôneries de l'enseignement public et de l'enseignement catholique.

L'Action catholique continue d'être citée par des diocèses comme Reims, Séez, Créteil, mais aussi le Mouvement eucharistique des jeunes. Les communautés nouvelles s'affirment, avec par exemple les camps de jeunes de Taizé, fréquemment cités, ainsi que les communautés comme l'Opus Dei, qui compte deux des 12 prêtres ordonnés par le diocèse d'Aix depuis 2000.

Au niveau national, sur les 756 séminaristes, 10% sont issus de communautés nouvelles. Ce nombre de séminaristes est à rapprocher de celui des prêtres qui quittent le ministère. Depuis 2000, ils ne sont pas numériquement importants, moins d'un par diocèse en dix ans. Mais lorsque cela arrive, c'est un véritable traumatisme pour toute la communauté, compte tenu du peu de prêtres encore jeunes.

 

 

Date de dernière mise à jour : 08/02/2016