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Claude Faivre-Duboz et Bernard Tracol : De l’expérience latino-américaine à notre réalité française 26 sept. 2019

Soirée débat du 26 septembre 2019

Des expériences sud-américaines

Claude Faivre-Duboz et Gérard Tracol

 

 

Claude Faivre-Duboz est prêtre. Il a exercé un ministère « fidei donum » pendant 40 années en Argentine. (« Fidei donum » c’est « Don de la foi », les deux premiers mots de l’encyclique de Pie XII invitant des prêtres à exercer leur ministère en dehors de leur diocèse d’origine). Claude a tiré de son expérience un livre paru en 2017 : « Humaniser la vie » (Ed. Karthala).

Gérard Tracol est un laïc et un ami de la Conférence Catholique des Baptisés de Lyon. Il est proche de la famille de Gabriel Longueville, prêtre « Fidei donum » en Argentine aussi et qui a été assassiné en 1976 pendant les heures sombres du terrorisme d’état. Gérard a publié récemment « La force des pauvres » (Ed. Karthala, 2019) pour témoigner de l’itinéraire de Gabriel Longueville.

L’Eglise d'Amérique latine est celle qui a reçu le concile Vatican II le plus en profondeur. Elle a intégré dans sa pratique pastorale la réalité du « Peuple de Dieu » en s’appuyant sur les laïcs. Les expériences de Claude et Gérard peuvent nous aider à comprendre les enjeux de cette expression « Peuple de Dieu » et à chercher comment elle peut résonner aujourd’hui en France.

 

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Le contexte

C’est celui d’un continent fait de pays devenus des théocraties coloniales par la force de l’Eglise et de ses papes et celle des gouvernements espagnols et portugais.

C’est celui de Vatican II. Le Concile a été pour C. Faivre-Duboz l’étoile qui l’a guidé dans le long cheminement qui a réuni sa foi et son engagement auprès des pauvres : « L’Eglise est revenu à l’Homme par le Concile », « Garder un œil sur les gens et l’autre sur l’Evangile », « On ne peut séparer l’Evangile du soin de l’Homme ».

Soutenue par des évêques de référence (Don Helder Camara au Brésil, Don Manuel Larrain au Chili, etc.) et des textes forts, l’Eglise s’est engagée en Amérique latine en sortant du « tout religieux clérical » pour porter son regard sur les pauvres.

En 1955 nait le CELAM[1], conseil des évêques sud-américain, à la source des 5 grandes conférences qui vont marquer ce retournement :

  • Rio de Janeiro en 1955
  • Medellin[2] (Colombie) en 1968
  • Puebla[3] (Mexique) en 1979
  • St Domingue[4] (République dominicaine) en 1992
  • Aparecida[5] (Brésil) en 2007 dont Jorge Mario Bergoglio fut l’animateur et le rédacteur du texte final.

C’est dans cet esprit qu’en 1965, peu avant la fin du concile 40 évêques se réunissent dans une catacombe et signent l’émouvant «  pacte des catacombes » où ils renoncent aux fastes de l’Eglise romaine[6].

Devant ce mouvement de fond des dictatures se mettent en place et la répression s’organise : pressions, enlèvements, torture, assassinats ; Gabriel Longueville sera exécuté avec son vicaire, son évêque et un laïc militant chrétien.

 

L’engagement

Porté par le souffle de la théologie de la libération[7] l’engagement des laïcs va introduire un véritable renversement ecclésiologique par la création des CEB, Communauté Ecclésiologique de Base, lieux d’engagement et de vie spirituelle. Les laïcs y vivent pleinement leur mission de « prêtre, prophète, et roi ». Le ministre ordonné y est un frère, « tuteur d’arbres qui ne demandent qu’à être vivants ».

Vivants en devenant adultes dans la foi et vivants en prenant en charge leur vie quotidienne : ce sera par exemple le grand programme « un toit pour mon frère » qui permit la construction de plus de 800 maisons par leurs futurs habitants.

C’est ainsi que l’on passe de la religion au Royaume de Dieu. Il se trouve partout où il y a de «  bons samaritains, le seul dans cette page d’Evangile qui fait œuvre d’acte religieux en soignant le corps sacré d’un autre homme ».

Les laïcs deviennent les acteurs privilégiés de l’évangélisation. C’est dans cette Eglise de frères que Dieu peut se retrouver au milieu des hommes. « L’unique sacré pour Dieu, c’est l’Homme ».

En France les églises se vident, mais le royaume de Dieu existe partout où l’on met l’homme au centre.

« Le Royaume ne passe pas nécessairement par des personnes religieuses ».

« Il y a dans le monde beaucoup de gens qui ne sont pas dans l’Eglise mais qui sont dans le Royaume ».

« Tout ce qui est au service de l’homme est un culte rendu à Dieu ».

 

Aujourd’hui

Peu à peu et comme nous le voyons en France, le prêtre va devenir le « hieros », celui qui est « sacré ». Mais Aparecida a redit par la voix du futur pape François le rôle des laïcs et des CEB et rappelé la vocation de service du sacerdoce ministériel envers le sacerdoce de tous les baptisés.

Le succès des mouvements évangélistes reste basé sur la culpabilisation et la victimisation des fidèles ; la communauté devient alors un « lieu de délivrance enfermant ».

 

Bibliographie

La conversion de l’Eglise latino-américaine, Luis Martinez Saavedra, Ed. Karthala, 2011

La transformation du christianisme en Amérique latine, Guillermo Uribe, Ed. Karthala, 2009

Tous, prêtres, prophètes et rois, Elmar Mitterstieler, Ed. Médiaspaul, 2018

 

 

 

 

 

[1] https://www.la-croix.com/Archives/2007-05-12/Le-Celam-et-l-Eglise-latino-americaine-_NP_-2007-05-12-291086

[2] https://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_2007_num_38_4_3625

[3] https://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_1979_num_10_2_1698

[4] https://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_1994_num_25_3_2710

[5] https://www.cairn.info/revue-etudes-2007-11-page-498.htm?try_download=1#

[6] https://www.reseaux-parvis.fr/wp-content/uploads/bsk-pdf-manager/parvis2015_3_concile50_pactecatacombes_97.pdf

[7] https://www.persee.fr/doc/polit_0032-342x_1984_num_49_4_3417

  https://www.la-croix.com/Journal/theologie-liberation-jamais-pertinente-2017-06-28-1100858932

 

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