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Coronavirus et Eucharistie

Le coronavirus et l'eucharistie

Cette crise nous appelle à prendre soin les uns des autres et à remercier Dieu chez nous

 

Thomas O'Loughlin

Royaume-Uni

20 mars 2020

 

"Toutes les messes sont annulées". Ce panneau vient d’être affiché devant mon église. Qui aurait pu l'imaginer il y a seulement quelques semaines ?

La plupart des catholiques en sont satisfaits. Les grands rassemblements sont exactement ce que nous ne voulons pas pour le moment. Ce qu'il faut faire pour l'instant, c'est garder nos distances de peur que nous ne contractions et ne transmettions le virus.

Mais dans chaque paroisse, il y a des catholiques qui n'aiment pas l'idée de "manquer la messe" et qui se demandent s'ils pourraient "avoir la messe" même s'ils ne se réunissent pas.

Plus inquiétant, j'ai entendu deux prêtres dire qu'ils ne se laisseront pas imposer par l'État - imaginé comme l'ennemi de l'Église - de fermer leur église. Ils veulent prendre la défense de la liberté de religion. Mais s'ils "fournissent la messe" - notez le verbe - ils mettront en danger les personnes mêmes qu'ils prétendent servir.

Si de nombreux fidèles ne seront pas dans une église ce week-end - et probablement pas à Pâques – cette situation pourrait nous aider à élargir notre compréhension de l'Eucharistie et à approfondir notre spiritualité.

 

Objet ou action ?

Depuis bien trop longtemps - certains historiens diraient depuis le 7e siècle - les chrétiens latins ont une attitude qui consiste à penser à l'Eucharistie comme un objet (quelque chose qui se fabrique en raison du travail du prêtre et de sa présence) ou comme une marchandise (nous nous comportons alors comme des consommateurs religieux).

Le langage que nous utilisons est celui de la réception. Nous parlons de « recevoir la Messe », d'  « assister à la Messe », de « recevoir la communion » et de « donner la communion ». Cette Eucharistie est  comme une action « extérieure » à obtenir d'une manière ou d'une autre.

Mais le mot "Eucharistie" est lié à un verbe d’action. C'est quelque chose que nous, tout le peuple de Dieu, faisons. C'est cette activité qui consiste à remercier Dieu le Père en tant que communauté réunie. Nous offrons cette louange et ce remerciement par le Christ notre Seigneur.

L'accent est mis sur la reconnaissance du Père. L'accès au Père nous est donné dans l'Esprit par Jésus-Christ. Même si la prière est dirigée par le prêtre il s'agit de notre activité de base en tant que chrétiens, et non pas d'une « chose » que le prêtre fait pour nous ou qu'il fabrique pour nous.

 

Le virus a frappé

Donc, si nous ne pouvons pas nous réunir à cause du COVID-19, pouvons-nous quand même rendre grâce au Père par le Christ ?

Réapprenons quelques bases.

1. Jésus est présent avec nous

De nombreux catholiques traitent les bâtiments d'église comme s'il s'agissait de temples païens, comme si Dieu n'était que "là-dedans". Mais la présence de Dieu est partout et le Christ ressuscité n'est pas limité par l'espace.

Cette présence de Jésus ressuscité au sein de la communauté se trouve dans cette phrase de Matthieu : "Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d'eux" (Mt 18, 20).

Même dans le plus petit rassemblement de seulement deux personnes, se tenant à deux mètres l'une de l'autre pour ne pas répandre le virus, le Seigneur ressuscité est au milieu d'eux. Il peut s'agir de deux personnes dans une maison, ou de deux personnes reliées par téléphone ou Skype.

Cela a été exprimé aussi dans la Didache (un guide des disciples du premier siècle) : "Partout où l'on parle des choses du Seigneur, là le Seigneur est présent" (4, 1).

2. Ma chambre est le lieu de prière de base

Nous pensons parfois qu'on nous ordonne seulement de prier dans une église. Nous avons grandi avec l'idée d'une messe le dimanche comme un règlement. Rappelons-nous cette instruction de Jésus :

"Chaque fois que vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, car ils aiment se tenir debout et prier dans les rassemblements et aux coins des rues, afin d'être vus par les autres. En vérité je vous le dis, ils ont reçu leur récompense. Mais quand vous priez, allez dans votre chambre, fermez la porte et priez votre Père qui est dans le secret ; et votre Père qui voit dans le secret vous récompensera" (Mt 6, 5-6).

On nous dit maintenant de ne pas aller dans la rue, de ne pas aller dans les églises et de ne pas nous approcher des gens. Nous pouvons donc redécouvrir la nécessité de fermer la porte et de prier seuls en sachant que le Père écoutera nos prières.

3. Centre et sommet

Nous décrivons l'Eucharistie comme le centre et le sommet de notre vie chrétienne, mais elle est souvent la seule partie de notre vie religieuse. Cette crise nous appelle à construire en prenant soin les uns des autres et en remerciant Dieu à la maison, ainsi qu'à l'église.

Si nous ne sommes pas reconnaissants pour les repas que nous partageons à la maison, nous ne sommes pas prêts à être reconnaissants lors de l’action de grâces que nous appelons l'Eucharistie.

4. Chaque table est un lieu sacré

Jésus a rencontré les gens et a enseigné à leur table. Chaque table est un lieu où nous pouvons rencontrer le Seigneur en ceux qui sont avec nous.

Nous ne mangerons pas ensemble comme des frères et sœurs dans une église pendant les prochaines semaines, alors commençons à nous rappeler que chaque fois que nous mangeons, nous devons être reconnaissants.

"Tu mangeras à ta faim et tu béniras le Seigneur ton Dieu pour la bonne terre qu'il t'a donnée" (Dt 8, 10). Nous devons être reconnaissants pour la nourriture (rendre grâce avant les repas) et pour le plaisir d'être ensemble (rendre grâce après).

 

Découvrons ce que signifie être Église

Nous ne serons pas réunis en grands groupes dans les prochaines semaines. Profitons de cette expérience pour redécouvrir que nous sommes l'Eglise, que l'Eglise n'est pas un bâtiment.

Rappelons-nous que nous devons être eucharistiques tous les jours, mais surtout aux repas ; que l'Eucharistie n'est pas ni un objet que l'on reçoit et que l'on prend ni une assemblée à laquelle on assiste.

N'oublions jamais que le Ressuscité est avec nous, qu'il intercède pour nous auprès du Père en ces temps inquiétants.

 

Thomas O'Loughlin est un prêtre catholique du diocèse d'Arundel et Brighton (Angleterre) et professeur de théologie historique à l'université de Nottingham.

 

Coronavirus and the Eucharist

This crisis calls on us to care for one another and thank God at home

 

Thomas O’Loughlin
United Kingdom

March 20, 2020

 

 

"All Masses Cancelled"

That sign has just gone up outside my local church. Who could have imagined it just a couple of weeks ago?

Most Catholics are simply glad. Large gatherings are just what we do not want at the moment. The loving thing right now is to keep our distance lest we catch and transmit the coronavirus.

But in every parish there are Catholics who do not like the idea of "missing Mass" and wonder could they not "get Mass" even if they did not gather?

In a more worrying vein, I have heard at least two priests say that they will not have the State – imagined as the Church's enemy – telling them to close.

They want to take the high ground of defending the freedom of religion. But if they go ahead and "provide Mass" – note the phrase – they may actually be endangering the very people they are claiming to serve.

But the fact that many regular Mass-goers will not be in a church this weekend – and maybe not even over Easter – might actually help us to broaden our understanding of the Eucharist and deepen our spirituality.

 

Object or action?

For far too long – some historians would say since the 7thcentury – Latin Christians have had an attitude of thinking about the Eucharist as an object (something that happens due to the priest's work and they are in attendance) or as a commodity (and we behave like religious consumers).

The language we use is the giveaway. We talk about "getting Mass" and "attending a Mass," and of "getting communion" and "taking communion." The image is that the Eucharist is "out there," and then we somehow obtain it or make it our own.

But the word "Eucharist" relates to a verb. It is something we, the whole People of God, do. It is our activityof thanking God the Father as a gathered community. And we offer this praise and thanks through Christ our Lord.

The focus is on thanking the Father. Access to the Father is provided to us in the Spirit through Jesus Christ. The prayers are led by the priest. It is our basic activity as Christians, not some "thing" that the priest does for us or makes for us.

 

The virus has struck

So if we cannot gather because of COVID-19, can we still offer thanks to the Father through Christ?

Let's re-learn some basics.

1. Jesus is present with us

Many Catholics treat church buildings as if they were pagan temples, as if God is only "in there." But God's presence is everywhere and the risen Christ is not limited by space.

This presence of the risen Jesus among the community was captured in this saying preserved in Matthew's gospel: "Where two or three are gathered in my name, I am there among them" (Mt 18:20).

Even in the smallest gathering of just two people, staying two meters apart so as not to spread the virus, the Risen Lord is among them. They might be two people in a house, or two people linked by phone or Skype.

This was expressed in another ancient Christian saying that is preserved in the Didache(a first-century new disciples' guide): "Wherever the things of the Lord are spoken about, there the Lord is present" (4:1).

2. My room is basic place of prayer

We sometimes think that we are only commanded to pray in a church building. We have grown up with the idea of Mass on Sunday as a regulation. But it is always sobering to recall this instruction by Jesus:

"And whenever you pray, do not be like the hypocrites; for they love to stand and pray in the gatherings and at the street corners, so that they may be seen by others. Truly I tell you, they have received their reward. But whenever you pray, go into your room and shut the door and pray to your Father who is in secret; and your Father who sees in secret will reward you" (Mt 6:5-6).

We are now being told to stay off the streets, out of the churches and away from people. So we can rediscover shutting the door and praying alone – knowing that the Father will listen to our prayers.

3. Center and summit

We describe the Eucharist as the center and summit of our Christian lives, but often it is the sole part of our religious lives. This crisis calls on us to build up the surrounding foothills by caring for one another and thanking God at home, as well as in the church.

If we are not thankful for the meals we share at home, we are hardly ready to be thankful at the Great Thanksgiving that we call the Eucharist.

4. Every table is a sacred place

Jesus encountered people and taught at their tables. Every table is a place where we can encounter the Lord in those with us.

We will not be eating together as sisters and brothers in a church for the next few weeks, so let's starting recalling that whenever we eat, we should be thankful.

"You shall eat your fill and bless the Lord your God for the good land that he has given you" (Dt 8:10).

We should be thankful for the food (grace before meals) and for enjoying it and the pleasure of being together (grace after meals).

 

Let's discover what it means to be Church

We will not be gathered as large groups for the next few weeks. Let's use this experience to rediscover that weare the Church; that the Church is not a building.

Let us remember that we must be Eucharistic every day, but especially at meals; that the Eucharist is not an object we get, take, receive or attend.

And let us never forget that the Risen One is with us, interceding for us with the Father during these worrying times.

 

Thomas O'Loughlin is a Catholic priest of the Diocese of Arundel and Brighton (England) and professor of historical theology at the University of Nottingham.

 

Commentaires (1)

berthollier georges
  • 1. berthollier georges | 22/06/2020
Pas étonnant que la dimension communautaire de l'Eucharistie ait un peu disparue. Pendant longtemps on a enseigné au catéchisme que la communion était une rencontre personnelle avec Jésus, le seul moment où on pouvait rencontrer Jésus, alors que le pain et le vin ne sont que le signe et le rappel d'un présence constante

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