Une bombe ou un énorme flop ?

Une bombe ou un énorme flop ?

Le pape François réforme à nouveau le processus synodal pour favoriser la contribution des "laïcs", mais cela n’aboutira à rien si les évêques locaux refusent de l’écouter.

Robert Mickens

Cité du Vatican

21 mai 2021

 

Le pape François dit souvent aux jeunes de ne pas avoir peur de "secouer tout ça".

Il utilise en fait l'expression espagnole "hacer un lío". Cela signifie, littéralement, "mettre le bazar".

Bien qu'il ne soit plus tout jeune, il a montré tout au long de son pontificat qu'il n'a pas perdu une once de cette audace juvénile nécessaire pour perturber, secouer et - oui - mettre la pagaille.

Il semble que le pape argentin de 84 ans ait recommencé. Il a été annoncé cette semaine qu'il avait autorisé de nouveaux changements dans le mode de fonctionnement du Synode des évêques afin de mieux prendre en compte les points de vue des "laïcs".

Cela peut être une véritable bombe ou un flop colossal. Tout dépend de la façon dont cela se passera.

Le secrétariat général du Synode, basé à Rome, a déclaré vendredi que le pape avait approuvé sa proposition de reporter d'un an la prochaine assemblée du Synode et de la scinder en trois phases distinctes.

L'assemblée qui discutera des moyens de mettre en place la synodalité, le principe constitutif de la vie et de la pratique de l'Église, devait se tenir à Rome en octobre 2022, mais elle a été repoussée à octobre 2023.

La phase diocésaine

Dans ce temps, les évêques diocésainssont invités à "écouter" activement les opinions des catholiques de leur diocèse.

Le secrétariat général du Synode leur enverra un questionnaire à cet effet et ils devront désigner une "personne responsable" pour superviser ce processus de consultation.

Chacune fera un rapport au secrétariat du Synode et à sa conférence épiscopale nationale. Cette dernière se réunira ensuite pour « discerner ce qui a été rapporté par tous ses diocèses. Ils écouteront ce que l'Esprit a inspiré dans les Églises qui leur sont confiées », précise le secrétariat du Synode. Chaque conférence épiscopale rédigera une synthèse de ce que les diocèses ont rapporté et l’enverra au secrétariat à Rome.

La phase continentale

Le secrétariat du Synode utilisera les rapports des différentes conférences épiscopales du monde entier pour produire un premier document de travail (Instrumentum Laboris). Ce document sera ensuite étudié lors d'une réunion de toutes les conférences épiscopales nationales d'un continent donné.

Le but de cette phase est de « promouvoir le dialogue au niveau continental sur le texte du premier Instrumentum Laboris et d'approfondir le discernement dans le contexte culturel spécifique de chaque continent », note le secrétariat.

Le contexte culturel de chaque continent ?

Ce que cela signifie, tout le monde peut le deviner. Le Vatican et de nombreux Européens, par exemple, considèrent l'Amérique comme un seul et unique continent. En réalité il y a au moins trois ou quatre ensembles géographiques. Sur le plan culturel et linguistique il existe de grandes différences entre les nombreuses conférences épiscopales qui s'étendent de l'Argentine, à l'extrémité sud, au Canada, à l'extrémité nord.

Il sera particulièrement intéressant de voir comment ces assemblées internationales seront organisées quand elles répéteront plus ou moins le processus diocésain et national  et rédigeront les rapports qui seront envoyés au secrétariat du Synode. Ce dernier les utilisera pour rédiger le deuxième Instrumentum Laboris. Ce sera le document de travail de l'assemblée synodale que le pape présidera en octobre 2023 à Rome.

Tout dépend de ce que les évêques voudront entendre

"L'articulation des différentes phases du processus synodal contribuera à rendre possible une véritable écoute du peuple de Dieu pour assurer la participation de tous au processus synodal. Il ne s'agit pas seulement d'un événement mais d'un processus qui met en synergie le peuple de Dieu, le collège des évêques et l'évêque de Rome, chacun selon sa fonction propre", précise le secrétariat général.

L'idée est que les points de vue de l'ensemble du Peuple de Dieu - laïcs, religieux, profès et clercs - sont soigneusement inclus et discernés à tous les niveaux.

Cela peut sembler trop beau pour être vrai et il est fort possible que ce soit le cas.

Même si le pape affirme vouloir recueillir et inclure les points de vue de tout le peuple de Dieu, les évêques continuent de détenir toutes les cartes et de contrôler la procédure. Si le pape - qui est le président du synode des évêques - peut leur demander d'exécuter le plan, il a peu de contrôle sur la façon dont ils le feront.

En fin de compte, ce sont les évêques qui décideront des points de vue qu'ils porteront aux réunions continentales et de ceux qu'ils ignoreront ou réinterprèteront.

La voix du peuple par la voix (et l'interprétation) des évêques. Dans des pays comme les États-Unis, cela ne semble pas très prometteur. Cela ressemble plutôt à une recette pour un lío real - un « désordre royal » !

Il sera intéressant de voir comment cela se passe. Mais une chose est sûre : le pape jésuite a apporté un changement majeur qui sera difficile à inverser.

Cette avancée ne sera pas facilement ignorée, même dans l'Église romaine.

L'actuel secrétaire général du Synode des évêques, le cardinal maltais Mario Grech, est déterminé à faire fonctionner cette nouvelle réforme et les méthodes associées de manière à ce qu'elles perdurent après la fin de ce pontificat.

Cela risque d'être désordonné au début, peut-être à long terme, mais c'est le prix à payer pour convertir toute l'Église à la synodalité - en particulier les évêques.

https://international.la-croix.com/news/letter-from-rome/a-papal-bombshell-or-a-huge-flop/14351

A papal bombshell or a huge flop?

Pope Francis further reforms the synod process to favor input from the "laity", but it will mean nothing if local bishops refuse to listen

By Robert Mickens

Vatican City

May 21, 2021

Pope Francis often tells young people not to be afraid to "shake things up".

He actually uses the Spanish phrase, hacer un lío. That means, literally, "to make a mess."

While he is no longer a youngster, he has shown throughout his pontificate that he's not lost one bit of that youthful audacity needed to disrupt things, shake things up and -- yes -- make a mess.

And now it looks like the 84-year-old Argentine pope has gone and done it again. It was announced this week that he's allowed further changes to the way the Synod of Bishops operates in order to better include the views of the so-called "laity".

This has the potential of being a real bombshell or a colossal flop. It all depends how it is played out.

The Rome-based general secretariat of the Synod said on Friday that the pope has approved its proposal to postpone the next Synod assembly by one year and break it up into three separate phases.

The assembly, which will discuss practical ways of making synodality the constitutive principle of the Church's life and practice, was to take place in Rome in October 2022.It's now been pushed back to October 2023.

The diocesan phase

In the interim period, local bishops are being instructed to actively "listen" to the views of Catholics in their diocese.

The general secretariat of the Synod of Bishops will send them a questionnaire for this purpose and they are to appoint a "contact person" to oversee this process of canvassing their people.

Each contact person will make a report to the Synod secretariat and the national episcopal conference. This latter body will then meet to "discern" what's been reported from all the dioceses."

A period of discernment will begin for bishops gathered in an assembly (episcopal conference). They will listen to what the Spirit has inspired in the Churches entrusted to them," the Synod secretariat said.

Each episcopal conference will draft a synthesis of what the local dioceses have reported and send that report to the secretariat in Rome.

The continental phase

The Synod secretariat will use the reports from the various episcopal conferences from around the world to produce an initial working document (Instrumentum Laboris) on the theme of synodality.

This document will then be studied at a big meeting of all the national episcopal conferences of a particular continent."

The purpose of this phase is to promote dialogue at the continental level about the text of the first Instrumentum Laboris and deepen discernment within the specific cultural context of each continent," the secretariat notes.

The cultural context of each continent? What that means is anyone's guess. The Vatican and many Europeans, for instance, look at "America" as one, single continent.

In reality, of course, there are at least three or four geographical land masses.

And culturally, linguistically? There is a wide range of differences between the numerous episcopal conferences spanning from Argentina on the southernmost tip to Canada at the northernmost top.

It will be particularly interesting to see how these international assemblies are organized.

In any case, they will pretty much repeat the previous diocesan/national process and produce reports to be sent to the Synod's secretariat.

It will then use all these reports to draft the second Instrumentum Laboris. This will be the working document for the Synod assembly the pope will preside over in October 2023 in Rome.

It all depends on who and what the bishops want to hear

"The articulation of the different phases of the synodal process will help to make possible a true listening to the People of God to ensure the participation of all in the synodal process. It is not just an event, but also a process that involves in synergy the People of God, the College of Bishops and the Bishop of Rome, each according to their proper function," says the general secretariat.

The idea is that the views of the entire People of God -- laity, professed religious and clerics -- are carefully discerned at various levels and included in any decision-making or additional discernment process.

If this sounds too good to be true, it quite possibly is.

Even though the pope says he wants to include the views of all the People of God, the bishops continue to hold all the cards and control the procedure. While the pope -- who is the president of the Synod of Bishops -- can tell them to carry out the plan, he has little control over how they do so.

In the end, it is bishops who decide which voices and views they take to the continental meetings and which they ignore or reinterpret.

The voice of the people through the mouth (and interpretation) of the bishops. In places like the United States, this does not sound very promising.

It sounds more like a recipe for un lío real -- a royal mess!

It will be interesting to see how this plays out. But one thing is for sure: the Jesuit pope has made a major change that will be difficult to reverse.

Benefices once granted are not easily revoked. Not even in the Roman Church.

The current secretary general of the Synod of Bishops, Maltese Cardinal Mario Grech, is determined to make the new reform and methods work so that they continue long after this pontificate is over.

It's all likely to be quite messy at the start. And maybe even for the long haul.

But this is the necessary price for "converting" the entire Church to synodality -- especially the bishops.

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